Le Code Noir de la Louisiane
1724


LOUIS, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre A tous presens et à venir, salut. Les directeurs de la compagnie des Indes nous ayant représenté que la province et colonie de la Louisiane est considérablement établie par un grand nombre de nos sujets, lesquels se servent d’esclaves nègres pour la culture des terres, nous avons jugé qu’il étoit de notre autorité et notre justice, pour la conservation de cette colonie d’ y établir une loi et des régies certaines pour y maintenir la discipline de l’église catholique apostolique et romaine et pour ordonner de ce qui concerne l’état et la qualité des esclaves dans lesdites isles. Et désirant y pourvoir et faire Connoître à nos sujets qui y sont habitués, et qui s’y établiront à l’avenir, qu’encore qu’ils habitent des climats infiniment éloignés, nous leur sommes toujours présens par l’étendue de notre puissance, et par notre application à les secourir : A CES CAUSES, et autres, à ce nous mouvans, de l’avis de notre conseil, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons dit, statué et ordonné, disons, statuons et ordonnons, voulons et nous plaît ce qui suit.

ARTICLE PREMIER, L’édit du feu roi Louis XIII, de glorieuse mémoire, du 23 avril 1615 sera exécuté dans notre province et colonie de la Louisiane ce faisant, enjoignons aux directeurs généraux de ladite compagnie, et à tous nos officiers, de chasser dudit pays tous les juifs qui peuvent y avoir établi leur résidence, auxquels, comme aux ennemis déclarés du nom chrétien, nous commandons d’en sortir dans trois mois, à compter du jour de publication des présentes à peine de confiscation de corps et de biens.

II. Tous les esclaves qui seront dans notredite province, seront instruits dans la religion catholique, apostolique et romaine et baptisés : ordonnons aux habitans qui achèteront des nègres nouvellement arrivés, de les faire instruire et baptiser dans le temps convenable, à peine l’amende arbitraire: enjoignons aux directeurs généraux dé ladite compagnie, et à tous nos officiers d’y tenir exactement la main.

III. Interdisons tous exercices d’autre religion d’autre que de la catholique, apostolique et romaine voulons que les contrevenans soient punis comme rébelles et désobéissans à nos commandemens : défendons toutes assemblées, pour cet effet, lesquelles nous déclarons conventicules, illicites et séditieuses, sujettes à la même peine, qui aura lieu même contre les maîtres qui les permettront ou souffriront à l’égard de leurs esclaves.

IV. Ne seront préposés aucuns commandeurs à la direction des négres qu’ils ne fassent profession de la religion catholique, apostolique et romaine à peine de confiscation desdits nègres contre les maîtres qui les auront préposés, et de punition arbitraire contre les commandeurs qui auront accepté ladite direction.

V. Enjoignons à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, d’observer régulièrement les jours de dimanches et de fêtes, leur défendons de travailler, ni de faire travailler leurs esclaves aux dits jours, depuis l’heure de minuit jusqu’à l’autre minuit, à la culture de la terre et à tous autres ouvrages, à peine d’amende et de punition arbitraire contre les maîtres, et de confiscation des esclaves qui seront surpris par nos officiers dans le travail : pourront néanmoins envoyer leurs esclaves aux marchés.

VI. Défendons à nos sujets blancs de l’un et de l’autre sexe, de contracter mariage avec les noirs à peine de punition et d’amende arbitraire ; et à tous curés, prêtres, ou missionnaires séculiers ou réguliers, et même aux aumôniers de vaisseaux, de les marier. Défendons aussi à nosdits sujets blancs même aux noirs affranchis ou nés libres, de vivre en concubinage avec des esclaves; voulons que ceux qui auront eu un ou plusieurs enfans d’une pareille conjonction, ensemble les maîtres qui les auront soufferts, soient condamnés chacun en une amende de trois cent livres et s’ils sont maîtres de l’esclave de laquelle ils auront eu lesdits enfans voulons qu’outre l’amende ils soient privés tant de l’esclave que des enfans, et qu’ils soient adjugés à hôpital des lieux sans pouvoir jamais être affranchis. N’entendons toutefois le présent article avoir lieu, lorsque l’homme noir affranchi ou qui n’étoit point marié durant son concubinage avec son esclave, épousera dans ]es formes prescrites par l’église ladite esclave qui sera affranchie par ce moyen, et les enfans rendus libres et légitimes.

VII. Les solennités prescrites par l’ordonnance de Blois et par la déclaration de 1639 pour les mariages, seront observées, tant a l’égard des personnes libres que des esclaves; sans néanmoins que le consentement du père et de la mère de l’esclave y soit nécessaire, mais celui au maître seulement.

VIII. Défendons très expressément aux curés de procéder aux mariages des esclaves, s’ils ne font apparoir du consentement de leurs maîtres : défendons aussi aux maîtres d’user d’aucunes contraintes sur leurs esclaves pour les marier contre leur gré.

IX. Les enfans qui naîtront des mariages entre les esclaves, seront esclaves et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves, et non à ceux de leurs maris, si les maris et les femmes ont des maîtres différens.

X. Voulons si le mari esclave a épousé une femme libre que les enfans tant mâle que fille, suivent la condition de leur mère, et soient libres comme elle, nonobstant la servitude de leur père et que si le père est libre et la mère esclave, les enfans soient esclaves pareillement.

XI. Les maîtres seront tenus de faire enterrer en terre sainte, dans les cimetières destinés à cet effet, leurs esclaves baptisés; et à l’égard de ceux qui mourront sans avoir reçu le baptême, ils feront enterrés la nuit dans quelque champ voisin du lieu où ils seront décédés.

XII. Défendons aux esclaves de porter aucunes armes offensives ni de gros bâtons, à peine du fouet, et de confiscation des armes au profit de celui qui les en trouvera saisis, à l’exception seulement de ceux qui seront envoyés à la chasse par leurs maîtres, et qui seront porteurs de leurs billets ou marques connues.

XIII. Défendons pareillement aux esclaves appartenans à différens maîtres de s’attrouper le jour ou la nuit, sous prétexte de noces ou autrement, soit chez l’un de leurs maîtres ou ailleurs, et encore moins dans les grands chemins ou lieux écartes à peine de punition corporelle, qui ne pourra être moins que du fouet et de la fleur-de-lys; et en cas de fréquentes récidives et autres circonstances aggravantes, pourront être punis de mort, ce que nous laissons à l’arbitrage des juges : enjoignons à tous nos sujets de courre fus aux contrevenans, et de les arrêter et conduire en prison, bien qu’ils ne soient officiers, et qu’il n’y ait encore contre lesdits contrevenans aucun décret.

XIV. Les maîtres qui seront convaincus d’avoir permis ou toléré de pareilles assemblées composées d’autres esclaves que de ceux qui leur appartiennent, seront condamnés en leur propre et privé nom, de réparer tout le dommage qui aura été à leurs voisins, à l’occasion desdites assemblées, et en trente livres d’amende pour la première fois, et au double en cas de récidive.

XV. Défendons aux esclaves d’exposer en vente au marché, ni de porter dans les maisons particulières, pour vendre, aucune forte de denrées, même des fruits, légumes, bois à brûler herbes ou fourrages pour la nourriture des bestiaux, ni aucune espêce de grains ou autres marchandises, hardes ou nippes, sans permission expresse de leurs maîtres par un billet ou par des marques connues, à peine de revendication des choses ainsi vendues sans restitution de prix par les maîtres, et de six livres d’amende à leur profit contre les acheteurs par rapport aux fruits, légumes, bois à brûler herbes, fourages et grains voulons que par rapport aux marchandises, hardes ou nippes, les contrevenans acheteurs soient condamnés à quinze cens livres d’amende, aux dépens, dommages et intérêts, et qu’ils soient poursuivis extraordinairement comme voleurs receleurs.

XVI. Voulons à cet effet que deux personnes soient préposées dans chaque marché, par les officiers du conseil supérieur ou des justices inférieures ; pour examiner les denrées et marchandises qui y seront, apportées par les esclaves, ensemble les billets et marques de leurs maîtres dont ils seront porteurs.

XVII. Permettons à tous nos sujets habitans du pays, de se saisir de toutes les choses dont ils trouveront lesdits esclaves chargés, lorsqu’ils n’auront point de billets de leurs maîtres, ni de marques connues, pour être rendues incessamment à leurs maîtres si leur habitation est voisine du lieu où les esclaves auront été surpris en délit; sinon elles seront incessamment envoyées au magasin de la compagnie le plus proche, pour y être en dépôt jusqu’à ce que les maîtres en ayent été avertis.

XVIII. Voulons que les officiers de notre conseil supérieur de la Louisiane, envoyent leurs avis sur quantité des vivres et la qualité de l’habillement qu’il convient que les maîtres fournissent à leurs esclaves ; lesquels vivres doivent leur être fournis par chacune semaine, et l’habillement par chacune année, pour y être statué par nous : et cependant permettons aux dits officiers de régler par provision lesdits vivres et ledit habillement: défendons aux maîtres desdits esclaves de donner aucune sorte d’eau-de-vie pour tenir lieu de ladite subsistance et habillement.

XIX. Leur défendons pareillement de se décharger de la nourriture et subsistance de leurs esclaves, en leur permettant de travailler certain Jour de la semaine pour leur compte particulier.

XX. Les esclaves qui ne feront point nourris, vêtus et entretenus par leurs maîtres pourront en donner avis au procureur général dudit conseil ou aux officiers des justices inférieures, et mettre leurs mémoires entre leurs mains; sur lesquels, et même d’office si les avis leur viennent d’ailleurs, les maîtres seront poursuivis à la requête dudit procureur général et sans frais ce que nous voulons être observé pour les Crimes et les traitemens barbares et inhumains des maîtres envers leurs esclaves.

XXI. Les esclaves infirmes par vieillesse, maladie ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront nourris et entretenus par leurs maîtres et en cas qu’ils les eussent abandonnés lesdits esclaves seront adjugés à l’hôpital le plus proche, auquel les maîtres seront condamnés de payer huit sols par chacun jour pour la nourriture et entretien de chacun esclave; pour le paiement de laquelle somme, ledit hôpital aura privilège sur les habitations des maîtres, en quelques mains qu’elles les passent.

XXII. Déclarons les esclaves ne pouvoir rien avoir qui ne soit à leurs maîtres, et tout ce qui leur vient par leur industrie ou par la libéralité d’autres personnes ou autrement à quelque titre que ce soit, être acquis en pleine propriété à leurs maîtres ; sans que les enfans des esclaves, leurs père et mère, leurs parens et tous autres, libres ou esclaves, y puissent rien prétendre, par successions, dispositions entre-vifs, ou à cause de mort :lesquelles dispositions déclarons nulles, ensemble toutes les promesses et obligations qu’ils auroient faites, comme étant faites par gens incapables de disposer et contracter de leur chef.

XXIII. Voulons néanmoins que les maîtres soient tenus de ce que leurs esclaves auront fait par leur commandement, ensemble de ce qu’ils auront géré et négocié dans leurs boutiques, et pour l’espèce particulière de commerce à laquelle leurs maîtres les auront préposés; et en cas que leurs maîtres n’ayent donné aucun ordre et ne les ayent point préposés, ils seront tenus seulement jusqu’à concurrence de ce qui aura tourné à leur profit; et si rien n’a tourné au profit des maîtres, le pécule desdits esclaves que les maîtres leur auront permis d’avoir, en sera tenu après que leurs maîtres en auront déduit par préférence ce qui pourra leur en être dû, sinon que le pécule consistât en tout ou partie en marchandises dont les esclaves auroient permission de faire trafic à part, sur lesquelles leurs maîtres viendront seulement par contribution au sol la livre avec les autres créanciers.

XXV. Ne pourront les esclaves être pourvus d’offices ni de commission ayant quelque fonction publique, ni être constitués agens par autres que par leurs maîtres pour gérer et administrer aucun négoce, ni être arbitres ou experts : ne pourront aussi être témoins, tant en matières civiles que criminelles, à moins qu’ils ne soient témoins nécessaires et seulement à défaut de blancs : mais dans aucun cas ils ne pourront servir de témoins pour ou contre leurs maîtres.

XXV. Ne pourront aussi les esclaves être parties ni ester en Jugement en matière civile, tant en demandant quand défendant, ni être parties civiles en matière criminelle; sauf à leurs maîtres d’agir et défendre en matière civile, et de poursuivre en matière criminelle la réparation des outrages et excès qui auront été commis contre leurs esclaves.

XXVI. Pourront les esclaves être poursuivis criminellement, sans qu’il soit besoin de rendre leurs maîtres parties, si ce n’est en cas de complicité ; et serons les esclaves accusés jugés en première instance par les juges ordinaires s’il y en a, et par appel au conseil sur la même instruction, et avec les mêmes formalités que les personnes libres, aux exceptions ci-après.

XXVII. L’esclave qui aura frappé son maître, sa maîtresse, le mari de sa maîtresse, ou leurs enfans avec contusion ou effusion de sang ou au visage, sera puni de mort.

XXVIII. Et quant aux excès et voyes de fait qui seront commis par les esclaves contre les personnes libres, voulons qu’ils soient sévèrement punis, même de mort s’il y échoit.

XXIX. Les vols qualifiés, même ceux de chevaux, cavales, mulets, boeufs ou vaches, qui auront été faits par les esclaves ou par les affranchis, seront punis de peine afflictive même de mort si le cas le requiert.

XXX. Les vols de moutons, chèvres, cochons, volailles, grains, fourrage, pois, fèves ou autres légumes et denrées faits par les esclaves, seront punis selon la qualité du vol par les juges, qui pourront, s’il y échoit, les condamner d’être battus de verges par l’exécuteur de la haute justice, et marqués d’une fleur-de-lys.

XXXI. Seront tenus les maîtres, en cas de vol ou d’autre dommage causé par leurs esclaves, outre la peine corporelle des esclaves, de réparer le tort en leur nom; s’ils n’aiment mieux abandonner l’esclave à celui auquel le tort aura été fait ; ce qu’ils seront tenus d’opter dans trois jours, à compter de celui de la condamnation autrement ils en seront déchus.

XXXII. L’esclave fugitif qui aura été en fuite pendant un mois, à compter du jour que son maître l’aura dénoncé à la justice aura les oreilles coupées et sera marqué d’une fleur-de-lys sur une épaule; et s’il récidive pendant un autre mois, à compter pareillement du jour de la dénonciation, il aura le jarret coupé et il sera marqué d’une fleur-de-lys sur l’autre épaule, et la troisième fois il sera puni de mort.

XXXIII. Voulons que les esclaves qui auront encouru les peines du fouet de la fleur-de-lys et des oreilles coupées soient jugés en dernier ressort par les juges ordinaires, et exécutés sans qu’il soit nécessaire que tels jugemens soient confirmés par le conseil supérieur, nonobstant le contenu en l’article XXVI des présentes, qui n’aura lieu que pour les jugemens portant condamnation de mort ou du jarret coupé.

XXXIV. Les affranchis ou nègres libres qui auront donné retraite dans leurs maisons aux esclaves fugitifs, seront condamnés par corps envers le maître, en une amende de trente livres par chacun jour de rétention; et les autres personnes libres qui leur auront donné pareille retraite, en dix livres d’amende aussi par chacun jour de rétention et faute par lesdits négres affranchis ou libres, de pouvoir payer l’amende, ils seront réduits à la condition d’esclaves et vendus, et fi le prix la de la vente passe l’amende, le surplus sera délivré à l’hôpital.

XXXV. Permettons à nos sujets dudit pays qui auront des esclaves fugitifs, en quelque lieu que ce soit, d’en faire faire la recherche par telles personnes et à telles conditions qu’ils jugeront à propos, ou de la faire eux-mêmes ainsi que bon leur semblera.

XXXVI. L’esclave condamné à mort sur la dénonciation de son maître, lequel ne sera point complice du crime, sera estimé avant l’exécution par deux des principaux habitans qui seront nommés d’office par le juge, et le prix de l’estimation en sera payé; pour à quoi satisfaire, il sera imputé par notre conseil supérieur sur chaque tête de négre la somme portée par l’estimation, laquelle sera réglée sur chacun desdits négres, et levée par ceux qui seront commis à cet effet.

XXXVII. Défendons à tous officiers de notredit conseil, et autres officiers de justice établis audit pays, de prendre aucune taxe dans les procès criminels contre les esclaves, à peine de concussion.

XXXVIII. Défendons aussi à tous nos sujets desdits pays, de quelque qualité et condition qu’ils soient de donner ou faire donner de leur autorité privée la question ou torture à leurs esclaves sous quelque prétexte que ce soit, ni de leur faire ou faire fait aucune mutilation de membre; à peine de confiscation des esclaves, et d’être procédé contre eux extraordinairement: leur permettons seulement lorsqu’ils croiront que leurs esclaves l’auront mérité de les faire enchaîner ou battre de verges ou de cordes.

XXXIX. Enjoignons aux officiers de justice établis dans ledit pays, de procéder criminellement contre les maîtres et les commandeurs qui auront tué leurs esclaves, ou leur auront mutilé les membres étant sous leur puissance ou sous leur direction, et de punir le meurtre selon l’atrocité des circonstances et en cas qu’il y ait lieu à l’absolution, leur permettons de renvoyer, tant les maîtres que les commandeurs absous, sans qu’ils ayent besoin d’obtenir de nous des lettres de grâce.

XL. Voulons que les esclaves soient réputés meubles, et comme tels qu’ils entrent dans la communauté, qu’il n’y ait, point de suite par hypothèque sur eux, qu’ils se partagent également entre les cohéritiers, sans préciput et droit d’aînesse, et qu’ils ne soient point s sujets au douaire coutumier, au retrait lignager ou féodal, aux droits féodaux et seigneuriaux, aux formalités des décrets, ni au retranchement des quatre quints, un cas de disposition à cause de mort ou testamentaire.

XLI. N’entendons toutefois priver nos sujets de la faculté de les stipuler propres à leurs personnes et aux leurs de leur côté et ligne, ainsi qu’il se pratique pour les sommes du deniers et autres choses mobiliaires.

XLII. Les formalités prescrites par nos ordonnances et par la coutume de Paris, pour les saisies des choses mobiliaires seront observées dans les saisies des esclaves voulons que les deniers en provenans, soient distribués par ordre des saisies; et en cas de déconfiture au sol la livre, après que les dettes privilégiées auront été payées, et généralement que la condition des esclaves soit réglée en toutes affaires comme celles des autres choses mobiliaires.

XLIII. Voulons néanmoins que le mari, sa femme et leurs enfans impubères ne puissent être saisis et vendus séparément, s’ils sont sous la puissance du même maître : déclarons nulles les saisies et ventes séparées qui pourroient être faites, ce que nous voulons aussi avoir lieu dans les ventes volontaires, à peine contre ceux qui seront lesdites ventes, d’être privés de celui ou de ceux qu’ils auront gardés, qui sont adjugés aux acquéreurs, sans qu’ils soient tenus de faire aucun supplément de prix.

XLIV. Voulons aussi que les esclaves âgés de quatorze ans et au dessus jusqu’à soixante ans, attachés à des fonds ou habitations, et y travaillant actuellement, ne puissent être saisis pour autres dettes que pour ce qui sera dû du prix de leur achat, à moins que les fonds ou habitations fussent saisis réellement; auquel cas nous enjoignons de les comprendre dans la saisie réelle et défendons à peine de nullité, de procéder par saisie réelle et adjudication par décret sur des fonds ou habitations, sans y comprendre les esclaves de l’âge susdit y travaillant actuellement.

XLV. Le fermer judiciaire des fonds ou habitations saisis réellement conjointement avec les esclaves, sera tenu de payer le prix de son bail sans qu’il puisse compter parmi les fruits qu’il perçoit les enfans qui seront nés des esclaves pendant fondit bail.

XLVI. Voulons nonobstant toutes conventions contraires, que nous déclarons nulles, que lesdits enfans appartiennent à la partie saisie si les créanciers sont satisfaits d’ailleurs; ou à l’adjudicataire s’il intervient un décret; et à cet effet il sera fait mention dans la dernière affiche de l’interposition dudit décret, des enfans nés des esclaves depuis la saisie réelle; comme aussi des esclaves décédés depuis ladite saisie réelle dans laquelle ils étoient compris.

XLVII. Pour éviter aux frais et aux longueurs de procédures, voulons que la distribution du prix entier de l’adjudication conjointe des fonds et des esclaves et de ce qu’il proviendra du prix des baux indiciaires, soit faite entre les créanciers selon l’ordre de leurs privilèges et hypothèques, sans distinguer ce qui est pour le prix des esclaves; et néanmoins les droits féodaux et seigneuriaux ne seront payés qu’à proportion des fonds.

XLVIII. Ne seront reçus les lignagers et les seigneurs féodaux à retirer les fonds décrétés sollicités ou vendus volontairement, s’ils ne retirent aussi les esclaves vendus conjointement avec les fonds.où ils travailloient actuellement, ni l’adjudicataire ou acquéreur à retenir les esclaves sans les fonds.

XLIX. Enjoignons aux gardiens nobles et bourgeois, ususruitiers, amodiateurs et autres jouissans de fonds auxquels sont attachés des esclaves qui y travaillent, de gouverner lesdits esclaves en bons pères de familles au moyen de quoi ils ne seront pas tenus après leur administration finie de rendre le prix de ceux qui seront décédés où diminués par maladie, vieillesse ou autrement, sans leur faute et aussi ils ne pourront pas retenir comme fruits à leur profit, les enfans nés desdits esclaves durant leur administration, lesquels nous voulons être conservés et rendus à ceux qui en font les maîtres et les propriétaires.

L. Les maîtres âgés de vingt-cinq ans pourront affranchir leurs esclaves par tous actes entrevifs ou à cause de mort et cependant comme il se peut trouver des maîtres assez mercenaires pour mettre la liberté de leurs esclaves à prix, ce qui porte lesdits esclaves au vol et au brigandage, défendons à toutes personnes de quelque qualité et condition qu’elles soient, d’affranchir leurs esclaves, sans en avoir obtenu la permission par arrêt de notredit conseil supérieur, laquelle permission sera accordée sans frais, lorsque les motifs qui auront été exposés par les maîtres paroîtont légitimes. Voulons que les affranchissemens qui seront faits à l’avenir sans ces permissions soient nuls, et que les affranchis n’en puissent jouir ni être reconnus pour tels, ordonnons au contraire qu’ils soient tenus, censés et réputés esclaves, que les maîtres en soient privés, qu’ils soient confisqués au profit de la compagnie des Indes.

LI. Voulons néanmoins que les esclaves qui auront été nommés par leurs maîtres, tuteurs de leurs enfans, soient tenus et réputés, comme nous les tenons et réputons pour affranchis.

LII. Déclarons les affranchissemens faits dans les formes ci-devant prescrites, tenir lien de naissance dans notredite province de la Louisiane, et les affranchis n’avoir besoin de nos lettres de naturalité pour jouir des avantages de nos sujets naturels dans notre royaume, terres et pays de notre obéissance encore qu’ils soient nés dans les pays étrangers : déclarons cependant lesdits affranchis ensemble le nègre libre incapables de recevoir des blancs aucune donation entrevifs à cause de mort ou autrement; voulons qu’en cas qu’il leur en soit fait aucune, elle demeure nulle à leur égard, et soit appliquée au profit de l’hôpital le plus prochain.

LIII. Commandons aux affranchis de porter un respect singulier à leurs anciens maîtres, à leurs veuves et à leurs enfans, en sorte que l’injure qu’ils leur auront faite, soit punie plus grièvement que si elle étoit faite à une autre personne, les directeurs toutefois francs et quittes envers eux de toutes autres charges, services et droits utiles que leurs anciens maîtres voudroient prétendre, tant sur leurs personnes que sur leurs biens et successions, en qualité de patrons.

LIV. Octroyons aux affranchis les mêmes droits, privilèges et immunités dont jouissent les personnes nées libres; voulons que le mérite d’une liberté acquise produise en eux, tant pour leurs personnes que pour leurs biens, les mêmes effets que le bonheur de la liberté naturelle cause à nos autres sujets, le tout cependant aux exceptions portées par l’article LII des présentes.

LV. Déclarons les confiscations et les amendes qui n’ont point de destination particulière par ces présentes, appartenir à ladite compagnie des Indes pour être payées à ceux qui sont préposés à la recette de ses droits et revenus voulons néanmoins que distraction soit faite du tiers desdites confiscations et amendes au profit de l’hôpital le plus proche du lieu où elles auront été adjugées

 

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