Amour et Dévouement
A Miss Ida B. Wells

par V.E. Rillieux

Notes sur "Amour et dévouement" par Joy Mettam


Tout pour l'humanité! tout pour Dieu! rien pour soi!
Telle est, du dévouement, l'inextinguible foi!-
Pour calmer la blessure,
Pour essuyer des pleurs, protéger l'orphelin,
Etouffer l'injustice et braver l'assassin,
Il faut une âme sûre!

Pour quelle noble cause, ô divine harmonie,
A tes feux je viens retremper mon génie!
Un (bel) ange des Cieux
Parut à l'horizon! Et sa race flétrie,
Veut que ma faible plume en ce jour lui dédie
Ce chant élogieux.

Jadis, en Béthulie, une vierge candide
Comme toi, pour les siens devint fière, intrépide;
Et le nom de Judith
Terrassant Holopherne, aux murs de la patrie,
Arriva jusqu'à nous! Et sa gloire infinie
Brille encore au Zenith.

Quelques siècles plus tard, au beau pays de France,
Le peuple, en deuil, demande à Dieu sa délivrance:
Jeanne d'Arc apparaît!
Vierge, elle est invincible, -aux combats elle vole!-
Du haut de son bûcher l'éternelle auréole
Lance un brillant attrait!

Mais toi, vierge au teint brun, au pays du Sauvage,
Par la voix, tu combats! Puis, comme en un mirage,
Ton coeur, au premier rang
Fait briller le flambeau de la noble phalange
Sans laisser sur les sols qu'effleurent tes pas d'ange:
Un long sillon de sang.

Oh! jamais! car ta race, abhorrant tous les crimes,
Des deux rôles, choisit le rôle des victimes
A celui des bandits
Dont les rifles, le lynch, le bûcher, la potence
Et les sombres forfaits sont par l'intolérance,
Dans tout le Sud bénits.

Parle donc! Que l'élan de ton âme oppressée
Redise, sans détours, à l'Europe froissée,
L'horrible sort des tiens
Que la jeune Amérique, adepte du supplice,
Immole, chaque jour, au dieu de l'injustice!
Idole des païens!

Judith et Jeanne d'Arc illuminent ta route!
Déjà le White Cap s'émeut et [te] redoute;
Mais pour son Ida Wells,
Un peuple valeureux, courbé pas la souffrance,
Implore avec amour de la Toute-puissance
Les bienfaits éternels.

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