Un extrait de "Je suis cadien"
par Jean Arceneaux
 

     I will not speak French on the school grounds.
     I will not speak French on the school grounds.
     I will not speak French...
     I will not speak French...
     I will not speak French...
     Hé! Ils sont pas bêtes, ces salauds.
     Après mille fois, ça commence à pénétrer
     Dans n'importe quel esprit.
     Ça fait mal; ça fait honte.
     Et on ne speak pas French on the school grounds
     Et ni anywhere else non plus.
     Jamais avec des étrangers.
     On sait jamais qui a l'autorité
     De faire écrire ces sacrées lignes
     À n'importe quel âge.
     Surtout pas avec les enfants.
     Faut jamais que eux, ils passent leur temps de recess
     À écrire ces sacrées lignes.

               I will not speak French on the school grounds.
               I will not speak French on the school grounds.

     Faut pas qu'ils aient besoin d'écrire ça
     Parce qu'il faut pas qu'ils parlent français du tout.
     Ça laisse voir qu'on est rien que des Cadiens.
     Don't mind us, we're just poor coonasses,
     Basse classe, faut cacher ça.
     Faut dépasser ça.
     Faut parler en anglais
     Comme de bons Américains.
     Why not just go ahead and learn English.
     Don't fight it, it's much easier anyway.
     No bilingual bills, no bilingual publicity.
     No danger of internal frontiers.
     Enseignez l'anglais aux enfants.
     Rendez-les toute le long,
     Tout le long jusqu'aux discos,
     Jusqu'au Million Dollar Man.
     On a pas réellement besoin de parler français quand même.
     C'est les États-Unis ici,
     Land of the Free.
     On restera toujours rien que des poor coonasses.

               I will not speak French on the school grounds.
               I will not speak French on the school grounds.

     Coonass, non, non, ça gêne pas.
     C'est juste un petit nom.
     Ça veut rien dire.
     C'est pour s'amuser, ça gêne pas.
     On aime ça, c'est cute.
     Ça nous fait pas fâchés.
     Ça nous fait rire,
     Mais quand on doit rire, c'est en quelle langue qu'on rit?
     Et pour pleurer, c'est en quelle langue qu'on pleure?
     Et pour crier?
     Et chanter?
     Et aimer?
     Et vivre?
 

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Biographie et Explication

            Jean Arceneaux a été conçu pendant qu'on "desenseignait" le français de chez eux aux étudiants de l'école a Barry Jean Ancelet parce que ce français-là n'était pas le vrai français. Malgré que le vocabulaire soit le même (la main, la tête, le pied, une chemise, mal, heureuse) leur français à eux n'était pas correct et il fallait l'oublier pour le re-apprendre.
            "Jean Arceneaux est né à l'âge de 27 ans, le 25 juin 1978, lorsque Barry Jean Ancelet était à Québec pour la première Rencontre des peuples francophones." -couverture de Suite du loup  Il est retourné à la région du Marais Bouleur au nord-ouest de Lafayette pour se dédier a la revitalisation de la culture francophone de sa jeunesse dans les mêmes lieu. Il y habite toujours, à tout près de son alter ego, à qui il fournit l'occasion d'exister exclusivement en français de temps en temps. Cette persona a aussi fourni et aidé à cultiver une nouvelle fierté dans le peuple dont il écrit.
            Il a publié deux recueils Je suis Cadien et Suite du loup, pour lesquels il est le plus connu. Ses écrits ont également paru dans plusieurs revues littéraires, y compris Éloizes, Feux follets, N'importe quelle route et, plus récemment, dans une édition spéciale de Feux Chalins; aussi bien que dans des numéros spéciaux de Nombres, Cahiers bleus, et La poésie est le cri de celui qui se fait. On le trouve aussi dans les anthologies Cris sur le bayou, Acadie tropicale, et Littérature française de la Louisiane. Il est apparu à Paris, à La Rochelle, à Québec, à Montréal, à Hull et à Moncton, aussi bien qu'à la Nouvelle Orléans et à Lafayette pour présenter ces oeuvres. Il a participé à la production de deux pièces de théâtre, "Jean l'Ours et la fille du roi" et "Martin Weber et les Marais Bouleurs." Il a aussi écrit plusieurs chansons qui ont été enregistrées par des musiciens cadiens, y compris Wayne Toups, D. L. Menard, le groupe Jambalaya, Kevin Naquin et Lee Benoit, entre autres.
            Ses poèmes décrivent la bataille que les Acadiens ont survécue pour leur héritage. Il décrit avec vivacité l'histoire de la descente des Acadiens louisianais. Avec son recueil Suite du loup on voit la fatigue et le désespoir d'un animal une fois fort et puissant. Il représente la fatigue d'un peuple épuisé, mais qui se bat contre la mort avec un entêtement né en fierté.
            L'extrait ici choisi fait parti d'un poème qui a été écrit à travers plusieurs années. "Je suis Cadien" décrit des émotions fâchées, lasses et fières. Dans l'extrait choisi, on peut voir la réalité cruelle de l'assimilation et de l'anglification des Acadiens louisianais.
            Les Acadiens ont été expulsés de leur pays en Nouvelle-Écosse d'aujourd'hui. Il y en a plusieurs milliers qui ont fini par se retrouver en Louisiane. Ils ont établi une nouvelle existence, leur culture fleurissait entourée par la Louisiane francophone. Malheureusement, les Américains sont finalement arrivés des années après la vente de la Louisiane. Ils sont venus avec leur culture, leur économie et leurs écoles. Le français n'était plus permis, interdit par loi. Étant un état des États-Unis où on vivait en anglais, la Louisiane a dû suivre les règles de ce gouvernement étranger. Le français a commencé à disparaître, petit à petit, jusqu'à ce qu'il reste seulement les Acadiens, isolés par choix. Même dans ces rangs-ci le français se perdait. Mais il y avait une fierté qui existe toujours aujourd'hui, malgré les événements comme celles qu'on voit dans l'extrait précédent.
            "Ces sacrées lignes" ont vraiment existé. Comme Jean Arceneaux le dit, avoir besoin de les récrire des centaines de fois cause l'idée de "pénétrer." Ce n'est pas appris, ce n'est pas compris, c'est forcé, ça pénètre comme une piqure léthale. Et ça fait honte. Ça fait peur. Les Acadiens, déjà isolés, se sont plus isolés pour être surs qu'on ne parlait pas en français avec un étranger. "On ne sait jamais qui a l'autorité/De faire écrire ces sacrés lignes/A n'importe quelle age." On avait peur d'être puni et on avait peur de faire puni nos enfants. Ça ne valait pas la peine de la honte pour nos enfants. "...il faut pas qu'ils parlent français du tout." Ça rend la vie plus simple. La vie cause moins de la peine comme ça. Dans un pays qui a été fondé sur les idées d'égalité, de la liberté et du choix de l'homme "and the pursuit of happiness," c'est ironique qu'on ne nous laisse faire. C'est arrivé jusqu'à qu'on ne savait plus comment qu'on devrait exister. "Mais quand on doit rire, c'est en quelle langue qu'on rit?"
            Cet extrait se trouve à la fin de la collection Suite du loup. A la fin du poème il s'agit d'une liste d'émotions horribles dont Jean Arceneaux se sent. Mais, malgré l'horreur écrasante de ses émotions, il finit, "Je vas le faire / Je suis Cadien." Le loup de la collection, attaqué, épuisé, battu et presque foutu, fait face à la mort et la refuse; une fin émerveillante; incroyablement forte, mais douce et passive. Comme les Acadiens ne cherchaient qu'à exister parmi les Anglais en Acadie, comme ils ne cherchaient qu'à vivre en paix en Louisiane, ici on ne veut que vivre. On ne vous battra pas, mais ne nous faites pas nous défendre.
            Jean Arcenenaux est fortement respecté et par ses contemporaines. Peut être le plus important, il a aidé à sauver un héritage et une fierté pour que Barry Jean Ancelet puisse le passer a ceux pour qui ils comptent le plus; les enfants du même age que les siennes en commençant avec les siens. Malgré qu'ils soient peu en nombres, ils sont tous immensurables en esprit.

-- par Jean Ancelet