L’émergence d’une littérature
francophone en Louisiane
Zachary RICHARD
Certainement l’exemple
le plus étonnant de l’émergence d’une littérature
francophone en milieu minoritaire est celui de la Louisiane à
la fin du 20e siècle. Dans une situation linguistique extrêmement
précaire, on y trouve une production poétique et la publication
de livres de langue française, pour la première fois depuis
environ un siècle. Et cela à l’intérieur
de la communauté cadienne qui, d’elle-même, n’a
pas connu de tradition littéraire auparavant. Pour comprendre
la dimension de cette renaissance culturelle, ou plutôt naissance,
il faut comprendre l’importance de la question de l’identité
cadienne.
Si l’on a pu créer une étincelle
littéraire de langue française en Louisiane, c’est
dû à la puissance et à la ténacité
de l’identité cadienne qui se définit par la langue.
Les racines de cette identité sont très profondes. Les
colons qui allaient devenir les Acadiens, sont venus de la même
région et de la même couche sociale. Parties de l’ouest
de la France et surtout du nord du Poitou, les premières familles
étaient unies par une culture commune. Avant d’arriver
au Nouveau Monde, ils partageaient déjà une expérience
et une vision sociale qui donnaient à leur groupe une grande
cohésion. Cette cohésion fut renforcée de plus
en plus par leur expérience nord-américaine.
La majeure partie des colons est arrivée
en Acadie entre 1632 et 1651. Déjà en arrivant ils furent
confrontés à un conflit inter-colonial qui les obligeait
à s’entraider. Le Cardinal Richelieu installa plusieurs
seigneurs en Acadie, qui se trouvèrent en concurrence. Cette
concurrence allait surtout devenir très chaude entre d’Aulnay
et de la Tour. Ainsi, les premiers colons acadiens se sont trouvés
au milieu d’une guerre civile dès leur débarquement.
Pris dans les conflits, leur notion de groupe et la cohésion
de leur société furent renforcées par leur situation
menacée.
En 1652, l’Acadie repasse sous
le contrôle des Anglais. Ce n’était que le début
d’un jeu géopolitique dans lequel les Acadiens se sont
trouvés parfois sous la dominance de l’Angleterre, et parfois
sous la dominance de la France. À l’intérieur de
la colonie, les sphères d’influences divisèrent
les Acadiens. Ceux qui vivaient sous les canons d’Annapolis Royale
avaient une toute autre relation avec les Britanniques, et par conséquent
avec les Micmacs, que ceux qui vivaient dans la région relativement
éloignée des trois rivières. Malgré ces
divisions, les Acadiens ont développé une identité
unique. Ils ont été le premier peuple d’origine
européenne installé sur le continent nord-américain
à se faire appeler et à s’appeler par un nouveau
nom.
Isolés géographiquement
et politiquement, les Acadiens ont développé une notion
d’identité détachée de l’empire européen
qui régnait dans la colonie à n’importe quel moment.
Cet isolement a provoqué chez les Acadiens l’illusion d’indépendance.
Ils ont cru, jusqu’à la déportation même,
qu’ils allaient pouvoir négocier leur neutralité.
Cette illusion a fini par leur coûter le pays et pour beaucoup
d’entre eux, la vie. Pour ceux qui ont subi l’exil, leur
solidarité, encore une fois, a été renforcée
par l’expérience.
Envoyés dans les treize colonies
britanniques d’Amérique du Nord, ou plus tard, directement
en France, les Acadiens en exil ont toujours été considérés
comme un peuple à part. Pendant l’exil, on trouvait des
Acadiens au Québec, dans les colonies britanniques d’Amérique,
dans les ports de l’ouest de la France, en Corse, à Saint
Domingue, en Guyane et dans les Îles Malouines. Dans la plupart
des cas, ils n’ont jamais pu s’intégrer dans la société
des pays dans lesquels ils se trouvaient, aussi bien au Maryland qu’en
France ou en Angleterre.
Pendant l’exil, les Acadiens n’ont
cessé de pétitionner les gouvernements sous le contrôle
desquels ils se trouvaient. On peut parler du début littéraire
acadien. Comme l’a fait remarquer M. de Finney, ces pétitions
ont contribué à la création du mythe de l’Acadie,
ou plus tard de la Louisiane, comme terre promise. Toutes ces pétitions,
aussi bien au roi de France, aux gouvernements britanniques ou au roi
d’Angleterre, contiennent deux points fondamentaux : 1) la déportation
est un acte injuste, et 2) le pouvoir politique doit rétablir
les Acadiens dans une situation semblable à celle qui existait
avant la déportation. Donc, on voit la création de deux
mythes parallèles : l’Acadie comme Éden, précédant
la déportation, et l’Acadie, ou bien la Louisiane, comme
terre promise suite à la déportation. Pour la plus grande
partie de la communauté en exil, la Louisiane remplaça
l’Acadie comme destination, sans jamais la détrôner
dans l’imaginaire des premières générations
d’exilés.
Dans toute cette histoire assez incroyable
d’exil, la chose que je trouve la plus étonnante est l’existence
d’un réseau de communication inter-acadien. Dès
leur arrivée, en février 1765, les premiers exilés
en Louisiane commencent à communiquer avec les familles éparpillées
autour du bassin atlantique. Ils demandent aux autres exilés
de venir les rejoindre. L’exil est la période mythique
pour la communauté acadienne en Louisiane, et c’est très
intéressant d’examiner les mythes qui ont été
créés.
D’abord il y a la chanson. Selon
la légende, quand les déportés ont marché
vers les chaloupes qui les emmèneraient vers l’exil, ils
chantaient. La chanson en question parle de trouver le bonheur avec
le seigneur et d’accepter le sort, c’est à dire le
malheur, avec résignation. Voilà le mythe de la victime.
Mais, à part cette interprétation, il existe une autre
possibilité diamétralement opposée. On peut voir
cette chanson non pas comme la preuve d’une passivité,
mais comme la manifestation d’une résistance courageuse.
Malgré les apparences de résignation, on peut quand même
imaginer les déportés chantant non pas la tête baissée
comme un peuple soumis, mais comme un peuple fier, la tête haute,
apeuré certes, mais prêt à affronter le défi.
Ce sont les deux traditions mythiques qui font partie de la tradition
acadienne en Louisiane : les Acadiens comme victimes, ou bien les Acadiens
comme résistants.
Cette opposition entre les deux visions
du mythe est apparente dans la façon dont les Cadiens (et aussi
les Acadiens) perçoivent l’histoire d’Évangeline.
Pour une partie de la communauté, Évangeline est l’incarnation
de l’idéal romantique. Séparée de son amant,
elle a passé sa vie à l’attendre et à le
chercher. Sans pouvoir le trouver, elle s’est consacrée
à Dieu. Pour les poètes cadiens contemporains, Évangeline
est devenue une caricature de passivité. Le mythe d’Évangeline
renforce l’idée des Acadiens comme des gens passifs qui
ont subi leur sort avec résignation, priant Dieu qui allait tout
arranger au paradis. Pour nous cette idée est inacceptable.
Il existe un autre courant, celui du
mythe de Beausoleil. Sans dénigrer la brutalité de la
déportation et de la perfidie du gouvernement de la Nouvelle-Écosse,
la tradition de Beausoleil permet d’imaginer les Acadiens comme
des gens qui eurent la possibilité d’agir. Dans cette tradition,
on imagine les Acadiens ayant une volonté, et une part de responsabilité
pour ce qui leur est arrivé. Selon la légende, quand les
exilés de Beausoleil (311 personnes) sont arrivés à
Saint Domingue, ils sont restés le temps de s’approvisionner
en eau douce et de tenir un bal. Donc, est né le mythe du Cadien
bon vivant, riant dans sa misère. En Acadie du Nord, le contrepoint
d’Évangeline est offert par la Pélagie d’Antonine
Maillet. En Louisiane, la plupart des héros sont des hommes (normal,
on peut dire dans une société patriarcale), mais notre
version de Pélagie nous est offerte par Antoine Bourque dans
l’histoire romancée d’Élisabeth Brasseux.
Suite au décès de son mari à Baltimore, Élisabeth
Brasseux prend sa famille en main et l’emmène en Louisiane.
Dans la société acadienne, autant en Louisiane que dans
les provinces maritimes canadiennes, le rôle de la femme est primordial.
C’est la femme acadienne qui transmet la culture. C’est
la femme acadienne qui a pu maintenir la cohésion de la famille
et donc de la société pendant l’exil. Pour nous
maintenant, le mythe de la femme cadienne est celui d’une fonceuse,
téméraire, féroce comme une lionne à la
défense de sa famille. Vu notre situation précaire, voilà
un mythe plus à l’heure que celui d’Emmeline Labiche
(Évangeline), assise sous un chêne au bord du bayou attendant
son Gabriel qui ne viendra jamais.
Si l’événement déterminant
de l’histoire acadienne a été la déportation,
la suite de cette catastrophe, pour les diverses communautés
acadiennes, est suffisamment divergente pour qu’à nos jours,
les Acadiens des Maritimes canadiennes et les Cadiens de la Louisiane
se distinguent par leurs différences plutôt que par leurs
ressemblances. Pour les deux communautés, n’empêche,
le passé comme le futur est déterminé par le conflit
entre l’isolement et l’assimilation. Parce que les forces
d’assimilation y sont beaucoup plus puissantes, ce conflit est
d’autant plus dramatique en Louisiane.
Dès leur arrivée en Louisiane,
les Acadiens ont subi des influences qui allaient finir par diviser
leur société. Cette divergence est caractérisée
par une distinction de classe qui elle, fut basée sur l’acquisition
d’esclaves. En Louisiane, les Acadiens ont eu accès au
capitalisme basé sur l’esclavage. Ceux qui ont adopté
le système esclavagiste, et ce ne fut qu’une minorité,
avaient ainsi la possibilité d’acquérir beaucoup
de biens matériels et par le même biais, de s’intégrer
dans l’aristocratie locale, autant créole qu’anglo-américaine.
Avant la guerre de Sécession, il y avait de nombreuses familles
acadiennes qui ont pu grimper l’échelle sociale et faire
partie de la classe des planteurs. Alexandre Mouton en est l’exemple
le plus connu. Son grand-père Salvador fut exilé de Grand-Pré
en 1755, l’année où Jean, le père d’Alexandre,
naquit. Jean Mouton est arrivé en Louisiane, avec ses parents,
du Maryland. Grâce à la fondation (il est spéculateur)
de Vermillionville (aujourd’hui Lafayette), Jean Mouton devient
un homme riche. Avec une vision tout autre que celle des créoles
(qui envoyaient leurs fils en Europe), Jean Mouton, comme la plupart
de l’élite acadienne, envoya son fils dans une université
de la côte est américaine, Georgetown University à
Washington D.C.
Dès son jeune âge, Alexandre
Mouton côtoie les anglophones. Il devient sénateur américain,
gouverneur de la Louisiane, propriétaire de 120 esclaves et président
de la convention de sécession de 1860. Sa première femme
est une créole, Melle Rousseau. Suite à son décès,
il épouse une américaine, Melle Jardiner. Alexandre Mouton
a pu s’intégrer à l’aristocratie louisianaise
d’une façon inimaginable pour la plupart des Acadiens,
devenus Cajuns. Son fils, Jean-Jacques Alfred étudie à
West Point et devient général de l’armée
sudiste. On l’appelle « Buck ».
Alexandre Mouton se considérait
créole, « Lousiana Creole ». Cela ne l’empêche
pas d’appeler une de ses filles Acadie, mais Alexandre Mouton,
comme les autres familles de l’élite acadienne, se tenait
loin de la plupart des Cadiens, et s’identifiait aux gens de sa
classe sociale. De plus en plus, la culture cadienne est associée
à l’ignorance et à la pauvreté. Elle devient,
autant pour l’élite acadienne que pour les Américains,
un objet de ridicule.
L’isolement social et géographique
est l’élément le plus important pour la préservation
de la culture traditionnelle acadienne ainsi que la langue française
en Louisiane mais, petit à petit, l’assimilation gagne
sur l’isolement. La loi de 1916, qui impose l’éducation
obligatoire de langue anglaise, donne le coup de grâce. Pour la
génération des Cadiens nés au début du 20e
siècle, leur langue française est considérée
inférieure à l’anglais des Américains.
En 1900, 85% de la population du sud-ouest
de la Louisiane est monolingue francophone. En 1950, ce pourcentage
est d’environ 50%. Selon le recensement de 1990, il y avait 250
000 francophones en Louisiane, moins que 12% de la population, et la
majorité de ces gens sont âgés de plus de soixante
ans. Dans cette situation peu promettante, arrivent quatre poètes
francophones, comme trois mages, comme des ronces dans la neige.
Pendant la table ronde, on m’a
demandé si la littérature cadienne pouvait s’exprimer
en anglais. La réponse, qui paraît peut-être paradoxale
pour une communauté vivant aux USA, est définitivement
« non ». Certes, il y a des éléments de la
culture qui peuvent se transmettre malgré la disparition de la
langue. Il y a toute une génération de jeunes Cadiens
qui se considèrent comme Cadien, ou plutôt comme «
Cajun », face aux anglo-américains. La perception d’identité
pour ces jeunes est culturelle plutôt que linguistique. Ceci dit,
il est impossible de concevoir une littérature cadienne sans
qu’elle soit de langue française. Une expression anglophone
fera partie de la littérature américaine. James Lee Burke,
natif de New Iberia Louisiana, dans ses romans policiers avec son héros
détective Cajun, ne fait pas partie d’une littérature
cadienne bien que beaucoup de ses personnages soient « Cajun ».
Ce n’est qu’un exemple parmi plusieurs. Une littérature
cadienne est par définition de langue française.
J’ai soulevé la question
de langue comme marque d’identité pendant la table ronde
avec mes collègues écrivains, Rino Morin Rossignol et
Gérard Leblanc. Je fus particulièrement intéressé
d’apprendre leur point de vue sur le « chiac ». Cette
langue hybride entre l’Anglais et le Français est pour
moi une manifestation unique de la société acadienne.
En Louisiane, un hybride semblable existe mais il est moins bien établi.
Chez nous, c’est la langue créole plutôt que le franglais
qui est le produit le plus fascinant de la collision culturelle. Dans
une situation sociale où deux ethnies se confrontent, le groupe
dominé finit par s’accommoder et incorporer des éléments
de la langue dominante pour créer un hybride. En Louisiane, ça
finit par donner non simplement la langue créole, mais aussi
la musique et la cuisine qui sont la gloire du pays. Parmi les quatre
poètes louisianais contemporains se trouve Debbie Clifton, femme
créole, c’est-à-dire noire louisianaise. Dans sa
poésie, je suis particulièrement touché par ses
écrits créoles (Blackie Frugé). Bien que je ne
parle pas le créole, pour moi la sonorité de cette langue
est enivrante de beauté. Le manque de facilité de compréhension
ne diminue pas l’estime que j’ai pour son talent de poète.
Et pourtant, cette langue souffre de médisance chez nous. Le
créole est toujours considéré, face au français
plutôt classique qui est le parler cadien, comme une langue inférieure.
De même pour le « chiac ».
Je suis particulièrement sensible
à ce problème. Dans mes chansons, de plus en plus, j’imagine
des personnages qui sont typiquement nord-américains, c’est-à-dire
métissés. Dans mon prochain album, il y aura des chansons
chantées en créole louisianais, en chiac, en franglais,
des chansons de métisses, de coureurs de bois, etc... Mon univers
est très personnel, et donc ne définit pas l’Amérique
du Nord. Cette géographie linguistique rend mes textes souvent
difficiles à comprendre pour un public francophone international.
Ceci dit, je suis incapable d’adapter mes textes car j’estime
que cette adaptation risquerait de compromettre l’intégrité
des chansons. En même temps, j’essaie d’affiner mon
expression et d’évoluer dans mon métier d’auteur.
Je suis peut-être l’exemple le plus flagrant de ce dilemme,
mais il est partagé, plus ou moins, par tous les auteurs francophones
d’Amérique. Il n’y a pas de bonne réponse
à la question de la pureté de la langue, et il n’y
a certainement pas de solution facile. Chaque auteur doit respecter
les influences qui lui sont particulières et essayer de les accorder
avec la compréhension francophone internationale d’une
façon originale.
Nous sommes tous sur une corde raide
suspendue au-dessus du canyon creux de la disparition. Beaucoup du charme
de ce que nous exprimons, nous les Francophones de minorité,
est très « local ». Suffisamment local pour ne pas
être compris. Je suis d’accord avec mon ami Rino Morin Rossignol
quand il dit que nous ne pouvons pas accepter la décadence de
la langue française. C’est avant tout une question politique.
Mais cette question politique est pertinente surtout au Québec.
Elle ne l’est certainement pas autant en Acadie, et encore moins
en Louisiane : pouvoir communiquer notre spécificité d’une
façon compréhensible pour un public francophone international,
en restant fidèles à nous-mêmes.
Le problème qu’évoquait
M. N’Doki N’Gulu pour les auteurs africains est le même
pour les poètes louisianais. Il faut que nous arrivions à
trouver un public en dehors de la Louisiane. En Afrique au moins, il
y a un public pour la littérature de langue française.
Pour nous en Louisiane, sans le soutien de la francophonie, nous n’avons
aucun espoir d’être lus. Depuis le début, nous avons
été et restons (resterons) dépendants de la francophonie
pour donner vie à nos espoirs littéraires. En 1979, Jean
Arceneaux est venu me trouver à Québec en quémandant
des textes de chansons. Je l’ai surpris avec des poèmes.
Ce fut le début de Cris sur le bayou . Par la suite,
j’ai pu trouver un éditeur pour Voyage de nuit
. Ces deux livres ont été publiés au Québec.
Le Congrès Mondial de 1994 (avec
le spectacle Acadie parle au monde, à Shédiac,
birthplace du Shiac) a donné à la famille pan-acadienne
un grand coup de fouet. Nous avons découvert des étincelles
qui brillaient, parfois faiblement, parfois brillamment, sur notre prairie,
et de ça on a fait un feu. À partir de ce moment, nous
avons trouvé la motivation pour accomplir plusieurs projets inimaginables
auparavant. En Louisiane, on a fondé ActionCadienne, organisme
bénévole dédié à la survie de la
langue française. Plusieurs échanges entre la Louisiane
et l’Acadie ont été entrepris. Aussi, dans le domaine
littéraire, des éditeurs du Nouveau-Brunswick ont publié
des poètes louisianais. Les Éditions d’Acadie ont
publié Lait à mère de David Cheramie.
Les Éditions Perce-Neige ont commencé une nouvelle série,
intitulée Acadie tropicale. La série a débuté
avec Faire récolte , de Zachary Richard, récipiendaire
du prix Champlain 1998, suivi par Suite du loup, de Jean Arceneaux,
et plus récemment À cette heure, la louve, de
Debbie Clifton.
Ce que je trouve particulièrement
touchant c’est que ces quatre livres sont la manifestation d’une
culture pan-acadienne. Comme si on n’arrivait pas à s’oublier.
Comme si on faisait des aboiteaux de paroles et que tout le monde se
mettait à les protéger.
Il est beaucoup trop tôt pour dire
si nos quatre poètes, comme disait Gaston Miron, entament la
transition entre la tradition orale et la littérature, ou si
leur (notre) poésie n’est que le dernier cri d’un
oiseau de mer tombé dans un océan d’oubli. Au moins,
c’est un bel hommage à la ténacité d’une
vieille culture nord-américaine, une culture qui a pu surmonter
déportation et exil, et qui a pu résister à l’assimilation
pour bientôt près de quatre cents ans. Ce sont les prochaines
générations qui vont pouvoir nous dire si cette littérature
louisianaise du début du 21e siècle est le cri de ralliement
d’un peuple cherchant sa voix, ou bien si elle est le dernier
délire d’un vieux cadavre joyeux, enfin bon à enterrer.
Bibliographie
ARCENEAUX, Jean. Cris sur le bayou, Collection,
Montréal, Éd. Intermèdes, 1980.
- Suite du loup, Moncton, Éd.
Perce-Neige, 1998, « Acadie tropicale ».
CHERAMIE, David. Lait à mère, Moncton,
Éd. d’Acadie, 1997.
CLIFTON, Deborah. À cette heure, la louve,
Moncton, Éd. Perce-Neige, 1999, « Acadie tropicale ».
RICHARD, Zachary. Voyage de nuit, Montréal
et Lafayette, L. Courteau/Éd. de la Nouvelle Acadie, 1987, révisé
2001, Montréal, Éd. Les Intouchables
- Faire récolte, Moncton,
Éd. Perce-Neige, 1997, « Acadie tropicale ».
- Feu, Montréal, Éd.
Les Intouchables, 2001.
- « Conte Cajun, L’Histoire
de Télésphore et Petit Edvard », Montréal,
Éd. Les Intouchables, 2000
Retour à la bibliothèque Tintamarre